Le piège semble se refermer sur les politiciens les plus vertueux du parti de la NUPES qui revendiquaient l’intransigeance pour autrui sans penser aux lendemains qui accusent. Pris dans la tourmente d’une parole déraisonnablement libérée, ils s’empressent désormais d’opposer aux procureurs télégéniques leurs droits les plus élémentaires.
La procédure pénale n’est pas un artifice au service des avocats pour faire libérer les coupables mais un ensemble de règles destiné à assurer l’équilibre entre les droits de l’accusation et de la défense. La présomption d'innocence, principe à valeur constitutionnelle, interdit de condamner tant que la preuve de la culpabilité n’est pas rapportée par celui qui poursuit. Les principes juridiques fondamentaux préservent chacun d’entre nous de l’arbitraire.
La vérité a besoin d’une enquête, d’une accusation, d’une défense, du contradictoire, d’un juge, d’un jugement, de voies de recours. Le procès équitable vérifie l’existence d’une démocratie. Les condamnations, les relaxes ou les acquittements sont prononcés dans les salles d’audience d’un palais de justice, pas dans les
access prime time ou par quelques signes d’un tweet.
L'indignation est devenue l’arme automatique d'une société sans pensée qui conduit au bannissement instantané. Les réseaux sociaux permettent aux idéologues d’ajuster leurs causes et de signaler les coupables à la vindicte populaire. La puissance des tirs moralisateurs oblige la foule et les célébrités au conformisme, sous peine d’être à leur tour pointées du doigt. Sous la pression, les followers de Panurge accomplissent ainsi au premier signal leur devoir médiatique de condamnation du coupable désigné pour ne pas être eux-mêmes taxés de complicité. Le lynchage s'emballe naturellement pour aboutir à l’écartèlement en place publique du pestiféré, réduit au silence, interdit de défense et privé de défenseur (Cf.
https://veberavocats.com/fr/lecartelement-en-place-publique-de-kurt-zouma/).
Les faux dévots affectionnent cette régression. Ils en usent, en tirent parti, au mépris des principes juridiques fondamentaux qu’ils ne manquent pas de revendiquer pour eux-mêmes quand le vent tourne.
Invitée de l’émission «
C à vous» sur France 5 le lundi 19 septembre 2022, Sandrine Rousseau, députée écologiste, a indiqué avoir reçue "
longuement" chez elle,
l'ex-compagne du secrétaire général d'Europe Écologie Les Verts. Elle a accusé ce dernier de
"comportements de nature à briser la santé morale des femmes », affirmant : « - Elles sont manifestement plusieurs - Moi, je n'ai entendu qu'un seul témoignage - Une enquête journalistique semble être en cours - Au moment où j'ai reçu cette femme, elle était très mal, elle a d'ailleurs fait une tentative de suicide quelques semaines après". Hors antenne, elle affirmera «
qu’il n’y a rien de pénalement répréhensible ».
L'épisode est vulgaire, potentiellement attentatoire à la vie privée d’une jeune femme, d’autant plus malsain que son auteure n’a libéré que sa propre parole. L’élue de la nation a réussi l’exploit d’être à la fois conseillère conjugale, psychologue, enquêtrice, procureur, juge, avant de finir en bourreau habillée de la panoplie scintillante de «
Belle Personne» pour guillotiner politiquement et socialement en place publique, sans texte, celui dont elle n’aura pas entendu le moindre mot. C’est beaucoup plus commode. Croire évite de réfléchir, d’interroger et de s’interroger.
La dérive opportunément tapageuse de l’égérie d’un nouveau format de télé-réalité a néanmoins un mérite. Elle ramène au bon sens. Elle rappelle qu’une femme peut aussi, par idéologie ou par intérêt personnel, s’affranchir de la loyauté la plus élémentaire. La parole des femmes, comme celle des hommes, ne peut être sacralisée.
L’avenir n’appartient pas à l’exécution sommaire, symbole de la tyrannie, symptôme de l’idéologie autoritaire revancharde et serviteur commode des ambitions personnelles.
L’avenir n’appartient pas plus à la « cellule interne » d’un parti politique, truffée de micros et de conflits d’intérêts, dont la seule dénomination démontre qu’elle enferme, referme ou étouffe.
Le seul avenir digne est celui d’une écoute spécialisée dans le cadre d’un traitement judiciaire efficace.
La justice a besoin de moyens.
Elle n’en a pas.
Il est urgent de lui en donner.