Le « droit à l’oubli » est une question importante.
Le droit de disparaître de la "toile" participe de la protection de la vie privée et des données personnelles.
La question : une personne peut-elle demander que tout ou partie des résultats de recherche la concernant ne soient plus accessibles au moyen d’un moteur de recherche ?
Dans un arrêt rendu le 16 mai 2014, la CJUE prend position.
Elle interprète de la directive 95/46/CE et détermine quelles obligations incombent en la matière aux exploitants de moteurs de recherche.
Le litige opposait Google à un citoyen espagnol et l’Agencia Española de Protección de Datos (autorité de protection des données personnelles espagnole).
L’intéressé demandait à Google la suppression dans les résultats de recherche de certaines données le concernant lorsqu’une recherche était faite à partir de son prénom et de ses noms.
L’Agence de protection des données personnelles espagnole avait fait droit à la plainte déposée, et ordonné à Google de retirer des données à caractère personnel le concernant de son index et d’empêcher l’accès à celles-ci à l’avenir. C’est dans le cadre du recours en annulation formé par Google contre cette décision qu’une série de questions furent déférées à la Cour de justice.
La Cour juge tout d’abord que l’activité d’un moteur de recherche consistant à trouver des informations publiées ou placées sur Internet par des tiers, à les indexer de manière automatique, à les stocker temporairement et, enfin, à les mettre à la disposition des internautes selon un ordre de préférence donné doit être qualifiée de «traitement de données à caractère personnel», au sens de la directive 95/46/CE.
L’exploitant de ce moteur de recherche doit être considéré comme le «responsable» dudit traitement.
La Cour rappelle en outre que les opérations visées par la directive doivent être qualifiées de traitement même lorsqu’elles concernent exclusivement des informations déjà publiées en l’état dans les médias. La Cour souligne ensuite qu’un traitement de données à caractère personnel, tel que celui en cause au principal, réalisé par l’exploitant d’un moteur de recherche, est susceptible d’affecter significativement les droits fondamentaux au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel lorsque la recherche à l’aide de ce moteur est effectuée à partir du nom d’une personne physique.
En conséquence, et pour autant que les conditions prévues par la directive sont effectivement satisfaites, l’exploitant d’un moteur de recherche est obligé de supprimer de la liste de résultats, affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir du nom d’une personne, des liens vers des pages web, publiées par des tiers et contenant des informations relatives à cette personne.
Ceci vaut également dans l’hypothèse où ce nom ou ces informations ne sont pas effacés préalablement ou simultanément de ces pages web, et ce, le cas échéant, même lorsque leur publication sur lesdites pages est en elle-même licite.
Pour la Cour, il convient d’examiner si la personne concernée a un droit à ce que l’information en question relative à sa personne ne soit plus, au stade actuel, liée à son nom par une liste de résultats affichée à la suite d’une recherche effectuée à partir de son nom, sans pour autant que la constatation d’un tel droit présuppose que l’inclusion de l’information en question dans cette liste lui cause un préjudice. Une personne peut donc, eu égard à ses droits fondamentaux consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte (droit au respect de sa vie privée et à la protection de ses données personnelles), demander que l’information en question ne soit plus mise à la disposition du grand public du fait de son inclusion dans une telle liste de résultats.
Ces droits prévalent, en principe, non seulement sur l’intérêt économique de l’exploitant du moteur de recherche, mais également sur l’intérêt de ce public à accéder à ladite information lors d’une recherche portant sur le nom de cette personne.
Dès lors, "le droit de la personne prévaut en règle générale sur l'intérêt des internautes".
La priorité est donc donnée à la protection sur l'information.
Mais, et la nuance est de taille, sauf quand "des raisons particulières telles que le rôle joué par une personne dans la vie publique, justifiant un intérêt prépondérant du public à avoir accès à ces informations".
Nous considérons qu'il existe ici une grande ambiguïté.
Il faudra trancher entre intérêt du public et voyeurisme.
A quel endroit devrons-nous placer le curseur du droit à l'ingérence ?