Il y a quelques mois, le
président de la FIA Mohammed Ben Soulayem évoquait sur les réseaux sociaux l’idée de faire revenir les moteurs V10 en Formule 1. Ces propos sont aujourd’hui remis à l’ordre du jour et un groupe de travail aurait été mis en place afin d’étudier les différentes possibilités. Quelles conséquences pourraient avoir ce retour ?
Le moteur V10 De 1989 à 1998, les V10 atmosphériques sont devenus une alternative aux V8 et V12 utilisés à l’époque jusqu’à devenir l’unique architecture utilisée à partir de 1998. A l’époque ces moteurs étaient devenus de véritables monstres de puissance avec plus de 900cv et pouvant monter jusqu’à 19000 tr/min, accompagnés d’un son donnant des frissons. Cependant, les V8 2,4l ont étés préférés pour la saison 2006 en raison d’un manque de fiabilités des V10. Le retour des V8 a amorcé une longue phase de critique sur le manque de sonorité émise par les machines, accentué par l’arrivée des V6 turbo hybrides lors de la saison 2014.
L’ère des V6 turbo hybrides Fini les moteurs atmosphériques aux sonorités gargantuesques, place à l’étouffement émis par les V6 turbo hybrides qui proposent une architecture totalement inédite jusqu’à lors : une unité de puissance constituée d’un V6, accompagné d’un MGU-H (turbine récupérant les gaz émis par la voiture afin de les rediriger vers le turbo afin de lui permettre d’être à haut régime en permanence) et d’un MGU-K (moteur permettant de transformer l’énergie cinétique développée lors des freinage en électricité permettant de donner un surplus de puissances aux roues lors de son activation : l’ERS). Ce système avait pour objectif de repermettre aux constructeurs de développer des équipements adaptables à leurs modèles de route, le pinacle de cette philosophie étant la Mercedes AMG-One possédant en son sein un moteur de F1.
Les fans du monde entier se sont insurgés du manque de sonorité argumentant que le plaisir de regarder la Formule 1 avait grandement diminué.
Malheureusement la réglementation prévue pour 2026 n’apporte pas de grands changements à cette fameuse mélodie propre à la F1. En effet, les V6 turbo sont conservés, bien que plus limités en afflux de carburant, mais sont cette fois-ci accompagnés d’un moteur électrique (MGU-H) de 400Kw représentant environ la moitié de la puissance transmise aux roues. Le MGU-K est mis à la poubelle afin de simplifier le fonctionnement de ces moteurs terriblement difficiles à créer, ce qui freinait l’arrivée de nouveaux constructeurs en raison de la difficulté et des coûts de développements nécessaires. Grande nouveauté également du côté du carburant qui sera maintenant synthétique et entièrement renouvelable. Cette réglementation qui se trouveras extrêmement utile aux motoristes dans leur quête de perfectionnement utile à leurs voitures de série, a attiré l’attention de Audi, qui rejoindra la grille en 2026 en rachetant l’écurie Sauber.
Cependant le problème sonore n’est toujours pas réglé, alors quelle serait la solution ? Retrouver les moteurs V10 ?
Le V10 est par définition un moteur atmosphérique, donc qui a besoin de consommer un combustible ce qui le rend polluant. Mais maintenant qu’il existe un carburant renouvelable, qui ne rejette pas de déchets fossiles dans l’air, pourquoi ne pas ramener à la vie ce son iconique ?
Un retour des V10, Oui, mais comment ? La Formule 1 voudrait remettre en place ces moteurs au plus vite. Maintenant quand ?
Option n°1 : 2026 ou 2028 en poursuivant avec la réglementation actuelle La FIA a d’abord envisagée d’abroger la réglementation 2026. Seulement cela pose d’énormes problèmes aux différents motoristes. Tout d’abord, ces entités ont investis des centaines de millions d’euros dans la recherche et développement de ces unités de puissance, qui étaient supposées les aider dans leurs branches routières respectives. Comment ces entreprises pourraient acceptés de perdre autant de temps et d’argent à moins d’un an de la mise en compétition de leurs conceptions.
De plus, RedBull, Audi et Alpine n’ont aucun moteur de prêt pour l’année prochaine. RedBull et Honda mettent fin à leur collaboration à la fin de la saison, Alpine a arrêté l’exploitation de son site de Viry-Chatillon pour la F1 au profit des moteurs Mercedes mais, même si la firme allemande leur fournissait des moteurs de la règlementation en cours, ceux-ci ne sont aucunement adaptés à leur châssis actuel. Quant à Audi, ils n’ont tout bonnement aucun moteur adapté à cette réglementation.
Option n°2 : 2029 en raccourcissant la prochaine réglementation Une solution qui pourrait satisfaire la majorité de la grille serait de raccourcir la réglementation 2026 afin d’implanter les nouveaux V10 lors de la saison 2029. Cela réduirait le retour sur investissement des motoristes ayant travaillés sur les V6 mais cela ne réduirait pas non-plus à néant tous leurs efforts et investissements. Mais cela pourrait fortement refroidir Audi qui rejoint la F1 en raison de cette réglementation précise et qui n’aurait ni châssis ni moteur pour la saison. Dans la même logique, Honda a décidé de rester en F1 en tant que motoriste d’Aston Martin. En revanche cela ne rebuterait en aucun cas RedBull puisqu’ils ne possèdent pas de marque de voiture à développer et n’ont donc pas d’enjeux sur la technologie utilisée sachant que leur partenaire technique Ford n’a pas émis de réserve à concevoir un moteur atmosphérique.
D’un point de vu sportif se dégage également certains avantages et inconvénients :
- Les équipes qui accusent déjà un retard de performance sur leur moteur peuvent voir une opportunité de rebattre les cartes rapidement.
- Les équipes qui seront performantes seront déçu de ne pas pouvoir continuer d’exploiter leur réussite technique.
- Les équipes s’impliqueront beaucoup lors de la première saison mais lors de la seconde arrêteront rapidement leur développement pour se concentrer sur la réglementation suivante.
Pour la plupart des équipes du plateau, peu importe le choix fait par la FIA, les réactions seront mitigées. Sauf pour une : Cadillac. L’écurie intégrera la catégorie reine en 2026 en tant qu’écurie cliente en achetant ses moteurs à la Scuderia Ferrari puis deviendra motoriste en 2028.
Cela implique deux choses :
- Que si la réglementation est prolongée, Cadillac n’aura pas de châssis répondant aux critères actuels de la FIA.
- Que si la prochaine réglementation est raccourcie, Cadillac aura tout le loisir de se pencher sur la conception de moteur pendant que les autres écuries seront concentrées sur le moteur en cours d’utilisation.
Verdict ? Personne à l’heure actuelle ne peut s’avancer sur la décision que vont prendre la FIA et les différentes équipes mais tout ce que l’on peut dire c’est que les prochaines semaines/mois seront décisifs pour la mise en place ou non du retour du moteur V10 et des émotions qu’il procure.
Philippe Veber - Veber Avocats - Avocats droit du sport et des sportifs - Lyon - Parishttps://veberavocats.com/fr/contactez-nous/